Plaidoyer pour la rénovation des associations régionales du bâtiment durable

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"Nous, associations régionales du bâtiment durable alertons sur la réduction, voire la suppression, des budgets affectés à la rénovation du parc bâti. Pourtant, c’est un enjeu clé de la décarbonation de la France. L’urgence climatique commande d’avoir rénové l’ensemble des logements d’ici 2050. L’objectif à atteindre est donc la rénovation globale de 700 000 logements par an en France. L’année dernière, nous en faisions sept fois moins.

Santé publique, écologie, sociale, la rénovation des bâtiments est à la croisée des chemins de l’ensemble de ces enjeux. C’est un impératif stratégique. La rénovation profonde du parc bâti, enjeu clé de la décarbonation de notre économie, permet de répondre à quatre priorités  : garantir un logement digne et abordable pour tous  ; réduire nos dépenses et notre dépendance énergétique ; soutenir le développement économique et la création d’emplois locaux, protéger la santé de nos concitoyens face aux passoires thermiques et aux vagues de chaleur de plus en plus intenses.

Les efforts produits par tous les gouvernements depuis une vingtaine d’années pour convaincre les propriétaires et les collectivités d’engager des rénovations commencent seulement maintenant à porter leurs fruits. L’Agence nationale de l’habitat (ANAH) annonce ainsi un triplement des demandes de financement pour opérer des rénovations d’ampleur sur des logements privés au premier trimestre 2025 par rapport à l’année passée. C’est une excellente nouvelle, d’autant qu’il y a encore dans notre pays 4,2 millions de résidences principales passoires ou bouilloires thermiques nécessitant des rénovations lourdes.

Mais cette dynamique qui s’enclenche est stoppée par les annonces du gouvernement de suspendre MaPrimeRenov’ en juillet. L’absence de soutien aux propriétaires enfin convaincus de lancer une rénovation durable et globale de leur bien met à mal des années d’efforts et de dépenses publiques. Cela génèrera des coûts bien plus importants dans le futur.

Au contraire, il faut amplifier les moyens nécessaires aux rénovations durables. Et ces moyens se chiffrent en milliards d’euros, chaque année. Nous savons comment la financer et dégager les milliards supplémentaires nécessaires à cette politique publique.

Tout d’abord, il faut utiliser les certificats d’économie d’énergie (CEE) à bon escient.

La cour des comptes l’a dit, les CEE sont «  un dispositif à réformer car complexe et couteux pour des résultats incertains  ». Les CEE représentent pourtant une manne financière colossale, avec 5 à 6 milliards d’euros par an. Celle-ci doit être fléchée sur des dispositifs à même de déclencher les rénovations globales performantes dont nous avons besoin. Pour le logement privé, il convient de flécher ces crédits sur «  Ma prime rénov’  » et les 589 Espaces conseil France Rénov’ et les agences locales de l’énergie (ALEC) qui dispensent aux particuliers des conseils précieux. Pour les bâtiments publics, vers l’Action des Collectivités Territoriales pour l’Efficacité Energétique (ACTEE) et le réseau des ALEC (montage de projet et ingénierie) et le fonds vert (travaux). Pour le logement social, les aides de l’Etat vers les bailleurs sociaux, qui maîtrisent les modalités de rénovation performante et durable mais peinent à maintenir le rythme de transformation de leur parc.

Les moyens supplémentaires attribués à l’ANAH doivent permettre d’accompagner un nombre accru de rénovations et de financer davantage les rénovations de logements collectifs passoires thermiques, détenus principalement par des propriétaires bailleurs et qui sont très peu rénovés aujourd’hui en raison de coûts trop élevés. Cela remettrait et maintiendrait sur le marché les 1,3 millions d’appartements locatifs F et G.

Enfin, le succès de la rénovation tient beaucoup à l’accompagnement humain. Il faut systématiser la prise en charge des «  accompagnateurs rénov’  » et renforcer l’accompagnement des maitres d’ouvrages, privés comme collectivités.

Les fortes chaleurs nous rappellent l’enjeu vital de la rénovation. Avec l’intensification des canicules et l’arrivée de pics de température pouvant atteindre 50°C, même au nord de la Loire, la majorité des logements de nos villes seront tout simplement inhabitables dans quelques années. La rénovation protège et sauve des vies. Nous proposons d’ailleurs la création d’un nouvel indicateur de «  confort d’été sobre » qui ouvrirait à des aides complémentaires à la rénovation et systématiserait ce volet dans les rénovations effectuées.

Rénover durablement les bâtiments, nous savons faire. Nous devons faire. Le gouvernement doit enfin mettre les moyens à cette politique publique vitale pour la santé, l’environnement et le confort de tous."

> LIRE LE PLAIDOYER

Signataires

  • Jean-François HERVÉ, président de Batylab  (Bretagne)
  • Benoît LOISON, président du CD2e (Hauts-de-France)
  • Jacques BAUDRIER, président d’Ekopolis (Ile-de-France)
  • Sylvain GIESSNER, président d’Envirobat Occitanie (Occitanie)
  • Benjamin ANTONINI, Stéphane BOUQUET, Sylvie DETOT, Sébastien GIORGIS, Sébastien RISMANN, co-présidents d’Envirobat BDM (Sud)
  • Nadia SAYROURI, présidente d’Odéys (Nouvelle-Aquitaine)
  • Benoit CONTET, président de Terragilis  (Bourgogne Franche-Comté)
  • Sabine BONNET et Daniel SCHOEN, co-présidents de Ville & Aménagement Durable (Auvergne-Rhône-Alpes)